• Territoires, de Olivier Norek

    Territoires, de Olivier Norek

     
    « Ah, il faut absolument lire Olivier Norek, et ces intrigues, dignes d'un excellent polar urbain ! » Et ledit O. Norek, invité d'une émission littéraire, de sourire avec un air pas tout à fait entendu, presque touché, ravi d'être « là », pour ainsi dire. Bien sûr qu'Olivier Norek, l'auteur de Code 93, Territoires et Sur-tensions est sympathique, tout comme il ne prétend pas forcément y toucher ; tout de même nous servira-t-il le couplet, sincère, du type à qui un professeur de français conseillait de ne jamais écrire, tout comme il nous entretiendra de son parcours d'autodidacte, de lecteur intuitif, sans parvenir à cacher ce qui ressemble à une joie un peu naïve. Il y a peu, O. Norek était « flic », et maintenant qu'il écrit des polars on lui laisse entendre, un peu partout, qu'il connaît son affaire, qu'on s'éclate à le lire.
     

    Tenez, l'Express y va de son « dialogues aux petits oignons », une expression que j'espérais ne plus croiser de sitôt, puis nous confie aussi que malgré un scénario au « réalisme effarant », l'auteur « assure le spectacle ». Comprenez que le livre de Norek nous parle des cités, qu'on va prendre à la fois un bain de réalité terrible et non manichéenne, même que le type-il-s'y-connaît et qu'en plus, ce sera écrit comme un « bon polar » ; n'étant point un fin connaisseur de cette littérature, je ne conçois pas, en tous les cas, que cela lui rende un bien franc hommage.
    Je m'y suis lancé, à mon tour de le confesser, en toute naïveté, confiant devant ces avis dithyrambiques.

    Olivier Norek cause des cités ? Oui, mais, sacrifiant à un format type qui est celui du traitement de surface (certes pas stéréotypé), celle-ci n'est qu'un personnage secondaire, dont les réactions, ainsi que le souligne un autre lecteur de Babelio, sont vouées à parfaire le schéma de Territoires, la démonstration courant sous les termes employés, cette fois encore, par d'autres lecteurs de Babelio : « urbain », et « politique ». Car le roman entend nous démontrer de quel machiavélisme sont capables les maires banlieusards de la grande ceinture parisienne. L'époque, au-delà d'une quelconque recherche de « réalisme », est à ces figures entre ombre et lumière du personnel politique, ici la maire de Malceny, nouant des relations avec les caïds locaux pour s'assurer, dans leur sillage, du soutien des populations vivant dans les tours, sinon de leur vote aux prochaines élections.

    D'urbain, vous ne verrez que quelques personnages, bien peu « incarnés », pour contredire une nouvelle fois l'Express, davantage passés à la moulinette du personnage « crédible », dont les artifices les suivent comme des ombres, à chaque fois que leur mécanique infaillible se met en branle : voyez donc ce « terrifiant » caïd de 12 ans, qui met des coups de pressions à un vieux en mettant son chat au micro-ondes. Notons également que le style, maintes fois loué sur Babelio ou ailleurs, « sans fioritures », se trouve ici dans l'obligation de sortir les muscles ; cette scène, une fois n'est pas coutume, méritait bien 4 ou 5 lignes. La documentation y a sans doute été d'une aide précieuse …

    On parle également beaucoup de l'équipe du capitaine Victor Coste ; sans être ridicule dans leurs échanges, qui semblent plutôt bienvenus, ils ne dépareilleraient pas dans une série télé, ce qui n'est pas une insulte. Seulement, ce n'est pas ma came, pour parler vrai. Si certains des évènements relatés dans Territoires sentent effectivement le vécu, c'est sous la forme d'un rapport clinique, oral presque, qui n'a que peu à voir avec le roman, non pas par manque d'ornementation ou de « beau style », mais bien davantage de précision, de figuration. En plus des personnages, qui ne sont pas assez incarnés, ce sont les mots qui manquent singulièrement de chair.

    Ce n'est pas une histoire mais son squelette que l'on ausculte, lorsque ce type de défauts sautent aux yeux ; dommage ou pas, je ne me risquerai probablement plus à lire O. Norek, tout sympathique et sincère qu'il fut.
    « A mon corps défendant, l'Occident, de Chahdortt DjavannPaul Auster, Le Livre des Illusions »

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